Un défilé de senteurs: les colliers de fleurs

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Maeva e manava ia 'outou i Porinetia! Soyez les bienvenus en Polynesie. Votre arrivée à l'aéroport de Faa'a est saluée par des danses, des chants, et une charmante vahiné vous entoure de somptueux colliers fleuris aux senteurs délicieusement enivrantes de tipanniers, frangipaniers, bougainvillers, et bien sur de la légendaire fleur de tiare (gardenia)

Collier fleurs tiare fleur d hibicus

Origine des colliers et couronnes de fleurs:

Légendaire, certes! car dans la mythologie polynésienne, le tiare Tahiti serait la création commune des dieux : Atea, créateur de l'espace et du temps; et de Tane, dieu de la beauté. Mais la grande beauté de cette fleur devint vite un sujet de convoitise. Aussi, Ta'aroa, le créateur de l'univers demanda à la voir et lui dit: " Tu es la plus belle chose de ma création, je te bénis et tu seras reine. Elle fut alors confiée à la sirène Mihia I te tai, résidant dans les régions sous marines, et qui, sur les conseils d'Atea, lui donna le nom de : " Te aho purotu", le souffle de la beauté. Lorsque la fleur eut germé, Atea déclara : " Tu es aujourd'hui devenue une plante mais l'esprit des dieux restera en toi. Les quatre premiers bourgeons appartiendront aux dieux, tandis que les six autres fleurs seront pour les hommes. " Puis il ajouta : " Maintenant que tu es dans la terre, tu porteras désormais le nom de : Te tiare a te nuna'a ma'ohi."  (la fleur de la tribu ma'ohi). 

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La tradition des colliers de dame nature est donc très ancienne, les premiers spécimens étaient fabriqués avec des fleurs, mais aussi du feuillage, des coquillages, des graines, des noix, du plumage, des ossements et des dents d’animaux. On raconte qu'à l'époque tribale, des branches fleuries furent symboliquement entrelacées par des chefs tahitiens et hawaiiens comme symbole de paix entre les deux pays. D'autre part, depuis des temps reculés, la vahine tresse des feuilles de cocotier, de fougères, ou de auti pour protéger sa tête et ses yeux.

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Un art gagnant :

La fleur tahitienne à aussi un goût de " revenez y" : ainsi, au retour de Tahiti, des voyageurs jetèrent leurs couronnes dans le lagon, en faisant le voeu de revenir en Polynésie. Seulement, cette tradition douce et sensuelle n'était pas au goût de tous : En 1820, le " code des îles sous le vent" interdit le port de couronnes de fleurs au temple. Une fois encore, les missionnaires avaient sorti les griffes contre tout ce que représentait la culture locale. 

Aujourd'hui, toute cérémonie, fête, manifestation sportive ou simplement accueil des visiteurs de marque est prétexte à réinitialiser ce savoir faire ancestral. Et il n'est pas rare que nos charmantes mamas travaillent des heures, voir des nuits entières pour confectionner des colliers et des couronnes, moment privilégié pendant lesquels les cancans du village, ou encore les histoires vécues ou non, transmises oralement par les tupuna (ancêtres), resurgissent du passé, agrémentées de chansons. 

Moment privilégié aussi avec la fleur elle même, qui révèle sa délicatesse et sa fragilité entre les doigts d'une main experte, moment intense et fusionnel, avec lequel aucun outil ne saurait rivaliser. La technique la plus simple consiste à enfiler les fleurs sur un fil avec une aiguille en la faisant passer à travers le pistil. Un geste qui requiert douceur, précision, et surtout respect de la fleur pour ne pas la blesser. 

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Quand la tratition et la nature sont liés :

En Polynésie, la protection de l'environnement, c'est sacré! Depuis bien longtemps, les insulaires ont compris que la nature peut tout aussi bien sauver des vies et rendre le quotidien harmonieux, que mettre leurs maisons en danger; en témoignent les tempêtes en mer ou les cyclones, intermèdes quelquefois incontournables de l'océan Pacifique. Mais pour qui sait la comprendre et en respecter les règles, cette déesse aux multiples talents sait aussi se faire généreuse. Quand les lagons regorgent de poissons qu'une main suffit quelquefois à attraper , quand les arbres croulent sous des fruits juteux et sucrés, quand chaque fleur y va de son effluve parfois tendrement insolente, c'est que malgré les inévitables méandres du modernisme, une complicité innée s'est perpétuée. 

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En Polynésie, un récif de corail offre à la faune aquatique nourriture et sécurité,  du moins tant que les hommes ne sont pas passés par là... mais de nombreux  insulaires, comme c'est le cas aux îles Australes, ont non seulement apprit à recevoir du lagon, uniquement ce qui convienà leur consommation personnelle, et il n'a y pas si longtemps, avaient coutume de remercier la nature d'un himene (prière chantée), lorsqu'il s'agissait d'un baleineau qui, à lui seul pouvait nourrir tout un village. Ces même récifs sont aussi " une assurance - vie " pour ces îles de rêves,  les préservant d'une immersion toujours possible; comme c'est le cas aux îlesTuamotus,  les motu étant des " îles basses" (non formées par un volcan) .Même les vents sont venus en aide aux navigateurs polynésiens, certains jours où les alysées ont choisit d'inverser leur trajectoire pour conduire les hommes, avec la complicité de la lune, du soleil et des étoiles,  jusqu'aux îles de Pâques, Nouvelle Zélande, ou Hawaii, et donner naissance au triangle polynésien. 

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Reculer pour mieux sauter :

Au final, dame nature n'a jamais cédé face aux menaces et à l'intolérance des missionnaires; et aujourd'hui, les fleurs non seulement, ont recommencé à exercer leur envoûtante fonction sur la tête et au cou des vahine, et des techniques de plus en plus élaborées ont fait voile vers le triangle polynésien et jusqu' en occident. Aux îles Marquises, le jour de la toussaint, l'esprit des défunts résonne à travers les himene d'une cérémonie des plus intenses, au milieu de multiples bouquets de fleurs écarlates. A la sorties de l'église, on se rend au cimetière pour habiller les croix de nombreux colliers fleuris et faire de chaque tombe un somptueux jardin coloré et parfumé. 

Danseuses big

Le tamure (danse tahitienne au sens général) , a lui aussi survécu du marasme de la colonisation et de ses interdictions religieuses. Et, pour le plaisir de tous, ces reines de beautés se sont bien rattrappées, rivalisant d'adresse et d'originalité, lançant un défi au temps en mariant habilement la grâce et l'élégance. Lors du Heiva: fêtes de tiurai (juillet), les concours de danse ou de sports ancestraux comme le lever de pierre ou le javelot font l'hunanimité parmi les spectateurs. Comme pour la danse, le port de couronnes de feuillages ou de fleurs chez les hommes n'est nullement un signe de féminité,  nous y verrons plutôt un moyen de se rapprocher des ancêtres (tupuna), et aussi d'exprimer sa reconnaissance pour l'infinie bonté de la nature polynésienne. 

"La culture ne mourra jamais, elle est attemporelle. C'est au peuple ma'ohi d'asumer cette responsabilité en la faisant vivre" disait Henry Hiro; La tradition, c'est  " avoir le respect de nos racines, d'être fiers de notre identité. Porter le flambeau de la culture ma'ohi pour mieux léguer les valeurs du fenua"

Jzel83wi

 

 

Date de dernière mise à jour : 02/04/2019

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