Le tressage, secret de mère en fille :
L'une des ressources principales des îles Australes après l'agriculture et la pêche est l'artisanat, et plus précisément l'art ancestral du tressage. Soutenu par des expositions annuelles, des fédérations d'artisans se sont crées, regroupant 84 associations. Les matériaux utilisés sont généralement les feuilles et tiges de cocotiers ou de pandanus, (toits des fare), ou encore le A'eho, voisin du bambou, pouvant atteindre trois mètres de haut. Il est en voie de disparition en Polynésie à l'exception de l'île de Rapa dans certaines périodes.
D'une années sur l'autre, les tiges sont préparées et stockées dans des sacs. La feuille de pandanus encore verte est coupée, la nervure retirée, et les feuilles sont séchées devant les fare pendant deux semaines. Lissées au couteau, et blanchies au jus de citron et de papaye, elles sont ensuite roulées en rouleau de 50 feuilles jusqu'à leur utilisation. Après avoir lissé les feuilles avec une aiguille, on les divise en lamelles pour effectuer le tressage. Néanmoins, le pandanus reste, là aussi, insuffisant. A titre d'exemple, 15 à 20 feuilles sont nécessaires pour la réalisation d'un chapeau.
Ces mêmes chapeaux sont étroitement liés à l'histoire de l'archipel, faisant référence aux anciennes parures des chefs. Les vêtements et objets du quotidien étaient également de fibres tressées: le Ure fara. La fibre de coco, permet , après extraction du nape, de tisser des cordes solides: les palmes sont à l'origine du ni'au. On utilise donc aussi la fibre naturelle de cocotier (le Kere ha'ari) qui pousse au pied de l'arbre. D'autres matériaux peuvent contribuer à l'art du tressage comme le potiron, le bananier, la canne à sucre, le piri-piri, ou encore une variété d'hibiscus. Différentes techniques de tissages révéleront aux objets un style particulier. Ainsi, un chapeau masculin pourra être sans dentelure, à plusieurs brins, et orné de motifs géométriques ou de chevrons, tandis que le chapeau féminin aura une tresse unie et dentelée.
De nombreux objets voient le jour: chapeaux,corbeilles, paniers, nattes, toitures des fare. Séchées à l'air libre et en plein soleil, les feuilles doivent perdre leur trace rouge. On les enroule autour de la main gauche dans le sens des aiguilles d'une montre, puis en sens inverse. La technique la plus simple, celle du damier, consiste à croiser le brin au dessus et en dessous. Pour tisser un motif, la méthode du " sergé" permet de croiser au dessus et en dessous de plusieurs brins. (ces deux méthodes pouvant être combinées). Les objets peuvent être décorés de fleurs, de coquillages ou de nacre.
Certains villages de Rurutu et de Rimatara se consacrent entièrement à cet artisanat familial et féminin. A Rimatara, chaque village possède une association d'artisans qui réalisent toute une gamme d'objets fait main allant du tressage de nattes, chapeaux, paniers, aux dessous de plats en pandanus ou en ni'au, en passant par les bijoux de coquillages, ou encore des petits tambours creux, des ukulele sculptés, des pagaies finement travaillées, et des pilons de bois pour le popoi. A cela s'ajoute la sandalette de purau pour la pêche et les toitures ni'au.